Des racines et des ailes

Posté par Kamit le 24 février 2008

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Tant que les lions ne sauront raconter leur histoire, nous entendrons toujours celle des chasseurs.

LES RACINES.

En 1482 Diego Cao découvre l’embouche du fleuve Congo… Cette introduction à l’histoire du Congo fait de l’Afrique un simple appendice de l’histoire européenne. Il ne serait pas trop tôt de sortir de cette caricature coloniale et réductrice qui fait encore office aujourd’hui d’histoire officielle et scolaire du Congo, de sa terre et de ses hommes. Notre histoire est celle des origines de ses habitants, depuis la naissance de l’humanité. Elle intègre notre espace géographique comme carrefour des peuples, de ses expressions étatiques à travers les ages, des éléments qui ont fait le quotidien de cette terre depuis les origines. Elle ne commence pas une nuit de partage à Berlin. Notre monde n’a pas toujours été immuable comme il nous semble trop souvent le percevoir, reléguant le progrès au seul mérite de l’apport coloniale.

Des centaines d’ouvrages, de témoignages, de recherches archéologiques sont disponibles pour bâtir une historiographie cohérente et continue. Certes plusieurs époques et parcelles de notre territoire restent à explorer avec les méthodes les plus modernes. Nombre de preuves essentielles moisissent encore ça et là car notre pays qui manque de moyen ou d’ambition, n’a t-il pas encore compris l’intérêt de l’histoire dans la construction d’une conscience nationale, indispensable à une mémoire commune et, ce faisant, au développement. Il nous appartient donc au niveau de la société civile de jeter cette graine dans ce domaine qui nous passionne, afin de ne pas laisser nos ancêtres disparaitre sans suite et nos descendants déambuler comme ayant dégringolés d’un arbre: sans références, sans valeurs, sans héritages, sans perspectives. Nos contradictions objectives sur ces sujets historiques seront en réalités nos contributions pour éclairer notre présent.

 

LES AILES.
L’histoire n’est pas une route morte. Au contraire, elle sert à vivre le présent en individus conscients, responsables et avertis. Ce sont des racines qui donnent un pilier autour duquel se développe la vie. Elle explique le présent et fait percevoir l’avenir. Nous croyant sans histoire, nous avons emprunté celles des autres, qui ne nous ont pas honoré dans leur récits réducteurs. Nous ressemblons désormais à de vulgaires singes, qui singent. Sans âme. Découvrez ici la vôtre, et mettez la en application. Si non elle n’aurait à rien servi d’être sue. Et notre avenir non plus, ne servira à rien. Construire notre intellect et nos actes à partir de la connaissance de nous-mêmes, nous conduira à des révolutions intellectuelles telles que:

1. La fermeture du mausolée de Brazza. Des français qui l’ont visité, seul le Front National s’en félicite! Un diplomate a même confié, après y avoir vu ces fresques qui représentent le nègre primitif élevé à la civilisation par le blanc, qu’il y est rentré convaincu des effets positifs de la colonisation, et ressorti honteux des sous-hommes que son pays avait créé. Quel est le sens de la célébration de l’indépendance qui depuis quelques années est marquée par la municipalisation accélérée, si d’autre part nous rendons au colonisateur un hommage supérieur à celui rendu à tout congolais de l’histoire? Ce mausolée de la honte pourra être transformé en musée/bibliothèque/archives nationales, pour un pays qui n’en a aucun.

2. La débaptisation de Brazzaville. L’un ne va pas sans l’autre. Si on est pour le nom de Brazzaville à notre capitale, il faut honorer celui à qui on le doit. Si à l’inverse nous sommes contre le mausolée de ce colon, à plus forte raison, on ne peut admettre qu’une oeuvre encore plus gigantesque, notre capitale entière, lui soit consacrée. Logique n’est ce pas!? Ajoutons que Brazzaville est la dernière capitale africaine à porter encore le nom de son colonisateur. Et enfin, rassurez-vous, ce n’est pas parce que la ville s’appellera Mfoa, Nkuna ou Mavula, qu’elle nous fera apparaitre comme des sauvages. Bien au contraire

3. Mettre l’histoire dans la rue. Dans quel bâtiment fut proclamée l’indépendance du Congo(1)? Qui étaient Bueta Mbongo(2), Maya-Maya(3), Casimir Mvoulaléa(4)? Sous le règne de qui arriva Diego Cao(5)? Des plaques commémoratives et explicatives devraient jalonner les avenues de nos villes, les places importantes, pour que les congolais cessent d’être incultes d’eux-mêmes. Les principales artères de nos centre-villes portent essentiellement des noms coloniaux. Encore! Il faut se liguer pour convaincre les pouvoirs publics d’y remédier. En France, il n’y même pas un égout du nom de Makoko (d’ailleurs comment concilie t-on la célébration de l’indépendance et la vénération à Makoko?). Rien ne justifie l’effigie tout cet étalage de flatterie aux anciens colons si non qu’une mendicité éhontée qui ne nous honore pas. Et lorsqu’on sait que certains quartiers portent des noms d’entreprises françaises (Batignolles), parce que cela fait plus beau quand ça fait européen, que Loubomo sans état d’âme à repris le nom de son colonisateur Dolisie sur simple promesse financières de son descendant en réalité désargenté… Arrêtons l’autodestruction et l’humiliation comme politique d’amitié entre les peuples.


Commémorer

Il faudrait sans doute créer un jour férié pour honorer les ancêtres. Nous célèbrerons à la fois tous nos héros dont les histoires seront contées dans les médias et dans les écoles, afin que nous apprenions à en être digne. Quoi de mieux que le 29 octobre, en mémoire de ce même jour en 1665 quand pris fin la bataille d’Ambuila ou périrent pour la liberté, le roi Antonio du Kongo, 4 de ses gouverneurs, 95 titulaires princes des royaumes alliés, 400 autres nobles et 5000 combattants. Cette défaite contre le Portugal marqua la fin de l’indépendance de cette région qui sera réduite en esclavage. Il faut que nous nous souvenions de ce jour là et des dissensions qui ont conduits à la défaite la plus cuisante de l’histoire bantoue. Car un peuple sans mémoire est condamné à revivre ses tragédies. A travers ce jour, nous tacherons de nous souvenir de tous les héros de notre vieux peuple.

4. Donner des prénoms africains à nos enfants. On est n’est pas plus intégré parce qu’on s’appelle Olivier que Rama ou Fadela. Bien au contraire, on dégage plus de richesse propre. On est moins aliéné, plus retrouvé avec soi même. « Olivier » ou « Jean-Pierre » porté par un congolais comme prénom, est le cachet d’une culture dénigrée et recouverte d’un cache vide. C’est un grossier trucage de l’âme, dirait Jean Paul Sartre. Un être qui singe ce qu’il n’a jamais été et ne sera jamais: l’héritier d’une civilisation qui ne fait que le dominer. « Olivier » est l’écho de l’esclavage, de la colonisation et de l’absence d’autoréparation. L’Olivier congolais est une plante qui n’existe pas en Afrique, qui n’y symbolise rien sur un noir. Stupide, tout simplement, autant que ces noires qui s’appellent Rose ou Blanche. Nos noms sont beaux, notre culture et notre histoire sont belles. Si les arabes ne s’appellent toujours pas Olivier ni les européens Mavoungou, pourquoi la mondialisation culturelle signifierait qu’Olivier en soit fier?

5. Introduire les langues locales dans nos foyers, et au delà. Des langues entières sont en voie de disparition.
Créer une académie des langues vivantes congolaises. Codifier des dictionnaires. Là encore, la société civile peut anticiper l’Etat. Le but de la société des historiens est celui-là. Créer la substance d’une vraie nation congolaise, avec son histoire commune partagée de tous et non à quelques érudits, ses langues vécues nourries et codifiées. Une nation qui connait son lien avec le reste des africains et de l’humanité. Un peuple qui parce qu’il a retrouvé son âme libre et conscient aura un destin.

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