Histoire contemporaine

Cette page comprend :

A. L’HISTOIRE DE BRAZZAVILLE
1ère Partie: L’architecture
2ème Partie: La société brazzavilloise (Les balbutiements, naissance des quartiers, les premiers bars, l’emploi et la refonte sociale des années coloniales, l’identité Brazzavilloise, les sapeurs depuis l’origine, la musique, la vie durant la colonisation, les coûtumes de la ville, la décolonisation et la révolution, la politisation de la ville, les sports… N’hésitez pas à nous transmettre des documents, informations, témoignages).

B. HISTOIRES REGIONALES:
1ère partie: Les ethnies.
2ème partie: histoires locales

C. HISTOIRE POLITIQUE
1ère Partie: De 1945 à l’indépendance
2ème partie: Le régime Youlou
3ème partie: Le parti unique, le marxisme.
4ème partie: La Conférence nationale.
5ème partie: Le retour du PCT

 

L’HISTOIRE DE BRAZZAVILLE : Architecture.

Nota: L’étoile (*) signifie que la SHC projette d’y poser une plaque commémorative.

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Le site choisit pour la capitale Congolaise était déjà bien avant la colonisation un haut lieu d’échanges commerciaux. On ignore depuis quand exactement cette région est peuplée, mais sans doute depuis que le bantou y a mis les pieds. Sa position stratégique le laisse penser. En effet, le puissant fleuve Congo (second mondial par son débit) vient y former un immense lac, une grande nappe d’eau et finit là son cours navigable, avant de se jeter de cataractes en cataractes jusqu’à l’Océan. Cette obstruction de la voie offrant un site de choix pour commercer de tous produits. C’est ce lac que Stanley a appelé « Pool », mais que les riverains appelaient Ntamo vers le nord du site, peuplé de tékés, et Nkuna était plus répondu du côté sud, peuplé de kongo. Le fleuve n’y constituait pas une frontière alors, plutôt un boulevard. Si bien que les autorités étatiques chevauchaient le fleuve. Et presque toujours, les villages de la rive gauche (Kinshasa) étaient parties intégrantes des principautés et autorités dont les sièges était de préférence sur la rive droite. Les Ngaliema qui cédèrent Kimpumbu (Kinshasa nord) et Kintamo (devenu Kitambo), sont une famille originaire de Kinsoundi dans le premier arrondissement de Brazzaville, plus précisément de Massina, ou leur caveau familial retapé dans les années 50, existe toujours*. Les commerçants qui se déployaient sur le site ne venaient pas non plus du haut fleuve côté congolais, mais d’encore plus loin, de l’intérieur de la RDC, dans les provinces actuelles du Bandundu, de l’Equateur ou de la Province orientale. Ngobila est le premier des princes de la région de Nkuna a avoir laissé son nom sur l’encre, grâce à Pigafetti transcrivit les récits du voyageurs Duarte Lopès qui le rencontra en 1591, et témoigna de la splendeur de ce site ainsi que de la civilisation qui s’y développait. Le Mokoko Ilo (roi Makoko pour le langage populaire) dont le nom a souvent été associé à cette cité, n’en est en réalité qu’un illustre étranger, qui n’y a jamais détenu aucun pouvoir. A l’arrivée des colons français, c’est N’Tsulu* siégeant à Mfoa qui règne sur Nkuna (toute la région) et son fils le seconde sur la rive gauche. Mfoa, n’est qu’un des villages du site de l’actuel Brazzaville qui en comptaient des dizaines.

 

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Le sergent Malamine.

Le 3 octobre 1880 Pierre Savorgnan de Brazza achète à Ntsulu une petite terre pour l’équivalent de 200 francs français de l’époque, et déclare ce lieu du nom de Brazzaville. Mais, ruiné par son long voyage des côtes gabonaises à Nkuna, le marin français qui devait repartir, confia la direction du poste et la représentation française à Malamine, un sénégalais, son fidèle compagnon. Il fut très apprécié pour ses talents diplomatiques, trop souvent reversés au profit de l’explorateur blanc, son maître. Mais, chose curieuse, Malamine choisira de poser la case faisant office de représentation française du côté gauche du fleuve*, déjà occupé par Stanley. C’était sans doute pour profiter des importants équipements qu’avait cet anglais au service du roi des Belges, dont l’action coloniale était beaucoup plus organisée. Ainsi, le sempiternel débat à savoir si Brazzaville ville coloniale naquit à Poto-Poto ou à Bacongo n’a pas lieu d’être puisque sa première case était à Kinshasa.
C’est à l’arrivée de Charles Dechavanne comme gouverneur que la première case européenne sera bâtie.


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La première case coloniale de Brazzaville (1884).

« Le fleuve était à 200 mètres de l’accore du plateau. Les habitants conduits par leur chef Nguia, refusaient de vendre leurs cases, M. de Brazza parlementera avec le chef Nguia. Conclusion : les 17 paillotes et les plantations sont achetées pour 920 barrettes.*

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Arrivée à Mfoa des révérends pères Pâris et Kraft qui viennent de la mission de Linzolo . » C’est ainsi que Charles de Chavannes présente l’installation du poste français du Pool sur l’étroite et abrupte colline du Plateau, où ce même De Chavannes allait inaugurer le 30 septembre 1884 la première maison « européenne » de Brazzaville. Nous savons par ailleurs que dès le 2 mai de cette année-là lui et ses aides locaux tracent une sente qui sera la première rue de la ville naissante, l’actuelle rue Edouard Renard qui prend dans l’axe du portail du Palais du Peuple et descendait jadis au wharf de la briqueterie (actuelle Ecole des Beaux-Arts, ex-Mafoua Virgile) avant d’être coupée en 1934 par le premier Tennis-Club et après 1982 par la nouvelle résidence présidentielle.

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Vue générale de Brazzaville par le pilote Cornu (1906)

Bien d’autres petites rues du vieux Plateau, souvent amputées sans discernement par des aménagements récents disproportionnés, conservent le souvenir d’une longue histoire… Ainsi la rue Thiriet est un lointain vestige de la Piste des Caravanes qui, venant de Loango, descendait le ravin de la Glacière pour remonter au Plateau par cette voie*.

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Route allant de la plaine au Plateau.

La ruelle Musy est tout ce qui reste d’un sentier en terre qui reliait vers 1900 le Plateau à la Mission Catholique en traversant le ravin du Tchad. En 1904 stationnait sur son parcours le parc aux boeufs du poste administratif ! En 1892 Casimir Maistre évoque le quartier du Plateau : « Sur un plateau presque nu, dominant le fleuve, une douzaine de constructions en briques ou en roseaux, dispersées un peu de tous les côtés et servant d’habitation ou de magasins, un mât de pavillon où flotte le drapeau tricolore, quelques plantations toutes récentes et deux ou trois allées plantées de bananiers… ». La Mission catholique (rebaptisée Aiglon plus tard) sera construite en 1887, la Plaine et ses factoreries en 1888, le camp Tchad en 1900.

 

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La mission catholique. Aujourd’hui annexe de la Cathédrale du Sacré-Cœur. Plus tard seront fixées les girouettes, arrivées à dos d’hommes depuis Loango par la route des Caravanes

 

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La Cathédrale du Sacré Cœur en 1911.

Elevée par Mgr Prosper Augouard de 1892 à 1894, la cathédrale du Sacré Cœur sera agrandie en 1904 (les tours) et 1911 (transept) ; elle demeure la plus vieille d’Afrique Centrale. Elle mesure 40 mètres de longueur, 12 mètres de largeur dans la nef, clocheton de 20 mètres de hauteur remanié en 1952 par Erell. Mgr Augouard travaillait lui-même souvent sur le chantier, en particulier sur la charpente. Les briques – il n’en fallut pas moins de 450 000 pour l’édifice entier – étaient fabriquées au niveau de l’actuelle Maison de la Radio par le frère Hyacinthe (mort en 1953), puis montées à la Mission par des porteurs . Les grands arcs de la base des tours sont précédés de statues polychromes en terre cuite de Saint-Pierre et de Saint-Paul. Elles semblent remonter avant 1914. Le Portail central à trois voussures est ouvert par une porte ornée de fers forgés. Le seuil est marqué d’une date (1892) : en-dessous se trouve le caveau que Mgr Augouard s’était fait aménager, mais sera finalement enterré en France. (Nous gardons l’espoir de ne pas avoir réveillé ici quelques excités du rapatriement des fossoyeurs de notre propre culture). Le tombeau du cardinal Emile Biayenda*, assassiné en 1977 s’y trouve bel et bien. Les deux grandes « cités », Poto-Poto et Bacongo sont tracées et construites entre 1900 et 1911*. Elevée au rang de commune en 1911, Brazzaville se voit dotée d’un premier plan d’urbanisme vers 1925 par le gouverneur Antonetti. La première maison privée élevée avec grand soin est sans nul doute la case Tréchot,

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La case Tréchot, aujourd’hui ambassade de Russie.

lentement élevée de 1888 à 1905 par les frères de ce nom*, fondateurs de la Compagnie française du Haut et Bas-Congo et immortalisés par l’écrivain Simenon sous le pseudonyme de « Ferchaux ! » Ce fut la première maison particulière d’AEF à disposer d’une vraie salle de bain à l’européenne en 1914.

 

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Le quartier de la Plaine.
Le quartier de la Plaine qui fait office de quartier des affaires dès 1887 et peu à peu de secteur résidentiel colonial ne fut pas choisi au hasard par les premières compagnies coloniales, qui devinrent souvent à partir de 1899 des compagnies concessionnaires, tirant leur fortune d’une exploitation sauvage et brutale des richesses de l’arrière-pays. Les Tréchot bâtirent leur puissance dans le Nord-Congo, d’où ils tiraient sans ménagements huile de palme et ivoire) : s’installant au bord du fleuve ils pouvaient construire leurs appontements privés, tout en s’isolant du pouvoir politique (au Plateau) et des autorités religieuses cantonnées à la butte de l’Aiglon. Tout au moins, ces derniers pouvaient faire semblant de ne rien voir. Vers 1910, quelques dizaines de bâtisses se dispersaient sur 3 km de rivage, reliées par la Corniche et l’Avenue Félix Eboué.

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L’arrivée du CFCO en 1934* va densifier ce secteur où la Poste Centrale restait isolée au milieu d’immenses terrains vagues… En 1933, P. Fabre, qui situe l’un de ses romans dans l’antique hôtel « Afrique et Congo » (emplacement de l’actuel immeuble SCKN construit vers 1975), évoque la Plaine à cette époque. Brazzaville doit également aux frères Tréchot plusieurs bâtiments du début du XXè siècle encore en état, dont le premier temple maçonnique qu’ils érigèrent rue William Guynet, prêt de l’actuel City Center, et qui peut se vanter d’avoir été longtemps la plus haute bâtisse de la ville.*

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L’avenue Eboué et l’hôtel Metropole

Le long d’une anse au confluent de la Tsieme et du Congo s’étalent des dizaines de pirogues plus ou moins traditionnelles en avant d’un vaste et informel marché au poisson. L’endroit appelé Yoro tire son nom de Yéro Thiam*, un Sénégalais propriétaire des lieux vers 1950. Dans le Brazzaville précolonial, ce fut un vaste port de commerce d’où les Makoko locaux tirait de substantiels ses ressources. Opoontaba* fut un des plus célèbre. Déniant l’autorité du Makoko de Mbé comme tentait de le lui imposer les colons, opposa une farouche résistance tant aux blancs qu’aux prétentions nouvelles d’Ilo. La querelle se solutionna en 1884 par « la palabre de Mfoa ». Tout ce quartier, jadis appelé contrée d’Impila (puis « Mpila » tout court) eu pour dernier chef Bankwa*, qui s’entourait d’une cour impressionnante dont témoignent de rares clichés. Il y mourut en 1916 et fut enterré selon les rites bateke comme ses prédecesseurs ; ces tombes, singularisées par une petite ouverture permettant de «nourrir » l’esprit du défunt par des libations, sont aujourd’hui oubliées de tous prés des anciens chantiers navals. En 1892 Casimir Maistre évoque le quartier du Plateau : « Sur un plateau presque nu, dominant le fleuve, une douzaine de constructions en briques ou en roseaux, dispersées un peu de tous les côtés et servant d’habitation ou de magasins, un mât de pavillon où flotte le drapeau tricolore, quelques plantations toutes récentes et deux ou trois allées plantées de bananiers… ».

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Vers 1930… Le palais du Gouverneur, futur Palais du peuple.

 

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Vers 1960…

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De nos jours.

Outre le Palais du Gouverneur (actuel Palais du Peuple) dès 1901, les premiers édifices publics importants sortent de terre vers 1910 : le premier hôpital (actuel Commissariat central, puis s’étendra jusqu’au quartier administratif de Mafoua Virgile, le collège inclus),

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Le premier hôpital, vers 1883

le tribunal (rasé en 1982, entre la BDEAC et la Cité Pasteur), le bureau des finances, immense case en fer à cheval détruite en 1973… A la place de l’Hôtel du 8 Février (ex-Hôtel Congo-Océan de 1936) se trouvait avant 1910 un camp de miliciens Noirs. Dès 1904 commence la construction du Cercle Civil (actuel CFRAD). En 1936 le gouverneur Reste fait tracer ce que nous désignons comme « le jardin public de Mafoua Virgile ».

La Poste Centrale est un vaste édifice d’inspiration classique qui fut construit en 1931.

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La Poste.

C’est dans à la fin de la seconde guerre mondiale que Brazzaville bénéficia d’investissements plus importants. Des architectes comme Chomette, Berruet, Calsat, Normand et surtout Roger Erell vont laisser libre court à leurs fantaisies, et souvent leur austérité.

 

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La basilique Sainte-Anne en construction, vers 1947.

En 1943, Erell dessine les plans d’une vaste église à Poto-Poto pensée et voulu par Mgr Biéchy en 1936 : la basilique Sainte-Anne du Congo. Il a pris en compte l’exposition aux vents, à la lumière, à la température, Mais aussi une synthèse des techniques occidentales appliquées à des apports culturels locaux. Sur un plan en croix latine s’élève alors en 15 ans de travaux (bien au-delà de l’inauguration de 1949) un curieux sanctuaire. L’élément dominant, outre la toiture, est l’usage systématique de l’arc brisé en ogive très aiguë, dont l’intrados descend en fait jusqu’au sol sans piliers ; cette forme est celle des fers de lance traditionnels du Nord-Congo. L’utilisation d’arcs semblables pour la voûte haute de 22 mètres dans l’oeuvre est issue de l’étude des cases-obus en terre du sud du Tchad et du Cameroun, l’objectif étant de suggérer des mains jointes en prière.

Les 5 000 m² de toitures sont couverts par 200 000 tuiles de céramique verte fabriquées en Provence et symbolisant des écailles de serpent.

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Interieur de l’église Sainte-Anne.

Les artisans autochtones s’introduisent pour la première fois dans un grand édifice public, entre autres le sculpteur Benoît Konongo*. Un autre réalise les fers forgés en forme de couteaux de jet précoloniaux de la tribune. Il faut ajouter que cette basilique, monument commémoratif de la France Libre, est un édifice très oecuménique : initiateur catholique, soutien franc-maçon (F. Eboué), appui financier de Mohammed V du Maroc… Le choix du nom de la basilique fut le fait du Père Moysan, d’origine bretonne, et donc très attaché à Sainte-Anne qui est l’une des « patronnes » spirituelles de sa région.

 

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Sainte Anne dans les années 50

A côté, comme une étrange et belle union de l’esprit et du corps, le stade Félix Eboué a été inauguré en 1944 par Charles de Gaulle, qui y prononça plusieurs discours essentiels, dont celui qui annonça la formation de l’éphémère Communauté Franco-Africaine en 1958.

L’initiateur du stade fut le Père Lecomte, forte personnalité brazzavilloise de l’époque, passionné de cyclisme (il fera d’ailleurs du stade un vélodrome). L’architecte Erell appliqua ici aussi son principe d’emprunt aux cultures, aux matériaux, aux artistes congolais. Ainsi le drainage de ce terrain marécageux aboutit à l’aménagement de « douves » en eau au pied de la façade, ornées d’étonnantes gargouilles en pierre sculptées par Benoît Konongo.

 

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La façade du stade Eboué.

La façade monumentale est exceptionnelle par son ampleur, ses proportions, l’harmonie de ses couleurs. Neuf arcades géantes en briques ocres sont obturées par un superbe treillis de ciment blanc dont les motifs reprennent à l’infini l’interprétation conjuguée du cercle et du carré. En avant, statue de Félix Eboué réalisée en 1957 par le sculpteur Jonchère, Grand Prix de Rome. Pendant la construction de la basilique, les vestiaires en sous-sol servaient de chapelle provisoire, surnommée « église du Bamba ». Le stade vient d’être remarquablement restauré.

La Maison Commune de Poto-Poto, degré zéro de l’architecture, est également signée Erell en 1942-43. Ce n’est pas l’édifice dont il est le plus fier. Il parait que jusqu’en 1937, le rond-point de Poto-Poto accueillait un étrange marché aux chiens où se vendaient des brochettes bateke cuites plantées verticalement dans le sol.

 

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Le Trésor public, à l’ombre de la Tour Nabemba

Si le Trésor Public (ex-Banque d’Afrique Occidentale) n’est construit qu’en 1950 par Erell, il y’a encore dernière ce bâtiment, une agréable maison coloniale construite en 1914, dont la façade principale donne en fait de l’autre côté, face au fleuve. Ce fut le siège de l’ancienne compagnie Mpoko.

 

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L’immeuble Asanakis.

En face du Trésor, l’immeuble Assanakis présente au coin de la rue Orsi une intéressante structure d’immeuble-paquebot aux lignes horizontales brisées par les axes verticaux des dessertes communes. Au milieu des années trente Assanakis, un grec, installa à cet endroit la première salle de cinéma du Congo à la fin des années 30. Ce quartier commercial fut autrefois le siège de la communauté portugaise, et la plupart des édifices dates des années 1945-1955.

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La Gare Centrale

La gare de Brazzaville, édifice remanié en 1962 est construite vers 1930 en même temps que le Chemin de Fer Congo-Océan, lentement et cruellement ouvert de 1921 à 1934.

La Primature, comme on appelle désormais sous les tropiques le cabinet du Premier ministre, est l’ancien Grand-Hôtel*, bâti en 1942 par l’entrepreneur local Dupart sur un dessin de l’architecte Cassaigne. Devant la Gare, un curieux élargissement, ni rue ni place, joint l’avenue FélixEboué. Cet emplacement correspond à l’emplacement de la halle du marché Biscarrat, disparu en 1937. Ce fut le premier marché « européen » de la Plaine.

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Le palais de l’artisanat, démoli en 1985.

En face de City Center, Erell érigea en 1954 le palais de l’artisanat* aujourd’hui disparu. C’était un marché d’art couvert, dont il ne reste que le porche, décoré comme une bande dessinée en 1969 par des artistes congolais. A quelques encablûre de là, rue William Guynet, se trouve encore, construite par les frères Tréchot, le bâtiment qui servait de temple abritant la première loge maçonnique vers 1910 !

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La fresque de la révolution.

Il n’y eut pas qu’Erell, même s’il domine sans aucun doute l’architecture coloniale de la ville. L’immeuble de la BCI avenue Amilcar Cabral (ex-UCB, ex-COFIPA)

 

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est élevé en 1949 par Chomette. Quant à l’ancien Ciné Vog (1953) avec son auvent audacieux, il est dessiné par Cazaban-Mazerolles. Derrière la Poste Centrale, et jusqu’à la Maison de la radio, s’étend un vaste secteur aux rues ombragées bordées de vieilles cases coloniales construites par divers architectes, dont certaines appartiennent à ce style « régionaliste » importé ici en même temps que le chemin de fer, et dont l’expression la plus aboutie est la Gare Centrale de Pointe-Noire, imitation de la gare de Deauville.

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La poste et son quartier à la fin du XIXè siècle. A gauche, l’école communale de la Plaine, future école de la poste, détruite pour construire la BEAC

A côté, la Sotelco (ex-Centre Philatélique) est une création de Jean-Yves Normand, vers 1955. On lui doit également le tribunal de grande instance de Brazzaville.

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Le Tribunal.

« La disposition des bâtiments tient compte à la fois des vents dominants et d’une exposition minimum des murs au soleil. Les portiques créent de larges zones d’ombre autour des salles d’audience (…). Les bureaux et locaux de travail sont équipés de brise-soleil à lames horizontales. Un système de double dalle de couverture atténue les effets de l’ensoleillement. Ces procédés techniques de protection contre les effets du soleil et l’usage de la ventilation naturelle se retrouvent utilisés par le même architecte dans l’Hôtel de Ville. Les procédés climatiques utilisés par J.-Y. Normand sont assez comparables à ceux mis en place en 1948-1950 par les architectes D. Badani et P. Roux-Dorlut pour le palais de justice d’Abidjan (Côte d’Ivoire) ». B. TOULIER : Brazzaville la Verte, Images du Patrimoine n°62, Paris 1996, p.13.

Inauguré en 1955, pour remplacer l’ancienne bâtisse que situait en face du palais du gouverneur (actuel palais du Peuple), à l’endroit a a été érigé la Banque du Développement des Etats d’Afrique Centrale.

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L’ancien tribunal, désaffecté en 1955 puis détruit en 1980 pour la construction de la BDEAC

Normand (avec une moindre participation d’Erell) signa également entre 1949 et 1955 les constructions de la place de la Mairie de Brazzaville qui longent l’avenue Foch, ces immeubles aux longs trottoirs couvert et bordés d’immenses arcades.

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Place de la Mairie.

Léon Guiral qui arrive en 1882 sur cette place de l’embouchure de la M’Foa (dont les fondation du petit pont derrière la station seront posées vers 1893) alors totalement autochtone, nous décrit le spectacle qui se tenait : « Maîtres des deux rives du Congo, les Batékés sont presque tous navigateurs et commerçants, et c’est dans leurs mains que se concentre le commerce du Haut Fleuve. On trouve dans les marchés de Nkouna, comme objets d’alimentation : le buffle, l’hippopotame, le porc, les cabris, les poules, le poisson, le manioc, la bière de maïs ; comme produits divers : l’ivoire, le tabac, la gomme-copal (…) Comme produits industriels, on trouve (…) : des poteries, des paniers en bois, des pipes, des bracelets et des colliers de cuivre. Toutes ces marchandises sont amenées à Nkouna par le fleuve ; seuls les objets d’alimentation viennent en partie des Bakouyas et arrivent par la voie de terre. C’est ainsi que le copal, l’ivoire et la poterie sont apportés par les peuplades du haut Congo : les Aban-Ho, les Bayanzis, les Bakhourous. Les Batékés de Mokoko (de Mbé) viennent vendre les esclaves, l’ivoire et la bière de maïs. (…) Les Batékés du Stanley-Pool (en fait des kongo) n’apportent sur le marché que des objets de luxe. (…) Les marchandises sont étalées par terre et en plein air : le marché dure pendant une demi-journée environ* ». Léon Guiral, Le Congo Français, Plon, 1889, p. 241-242).

 

 

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Ilo, le Mokoko de Mbé.

Mgr Prosper Augouard estimait qu’ici s’échangeaient prés de cent défenses d’éléphant par jour !

 

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Hotel de Ville de Brazzaville.

L’Hôtel de Ville élevé en 1963 est une idée de Youlou. C’est une construction remarquable fondée sur une dissymétrie savamment calculée entre les volumes, les jeux d’ombres, les couleurs. Il a succédé à l’ancienne Mairie inaugurée en grande pompe en 1912, Brazzaville étant devenue une commune l’année précédente. Derrière l’Hôtel de Ville subsiste de cette lointaine époque une jolie case au bord du fleuve qui fut la première résidence officielle des maires de Brazzaville. En contre-bas de cette vieille case, sur la berge du Congo, se trouvait à la fin du XIX°siècle Port Léon*, le petit port des religieux. En effet, à cette époque le domaine de la Mission Catholique allait de la cathédrale jusqu’au fleuve ! De ce minuscule chantier naval dont rien ne subsiste aujourd’hui sont sortis quelques uns des premiers bateaux modernes du Congo, comme le célèbre Diata-Diata* qui conquis les marécages du Nord-Congo en 1886, ou le Léon XIII en 1897.

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Le quartier de la mairie en 1965

A noter que l’avenue Foch est une des plus anciennes voies de Brazzaville moderne : imaginée dès 1888 par Mgr Augouard pour relier la cathédrale au Port Léon sur le fleuve, elle est déjà tracée entièrement en 1892 et plantée peu après de manguiers aujourd’hui plus que centenaires !

 

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La piscine caïman

En commun, Erell et Normand signèrent ensemble les immeubles paquebot de la rue Alfassa, qui va de Score jusqu’à la poste centrale. Celui de droite, actuellement l’ARC, abritait un magasin, tandis que celui de droite était un immeuble portugais. Juste en face du centre culturel russe, qui fut en 1899 le siège des factoreries Hatton & Cookson.

 

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Banque de l’habitat. Ex-US embassy.

Bien que Erell, encore lui, s’appropria la plupart des construction de l’avenue Amilcar Cabral, dont l’ex-Ambassade des Etats-Unis actuellement Banque Congolaise de l’Habitat, et déjà à l’époque siège de la Banque Belge d’Afrique.

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L’état major, en 1943

Le quartier du Tchad (Camp Clairon, 15 Août) s’étend sur une colline qui descend doucement vers le fleuve depuis les hauteurs du parc zoologique, séparée des secteurs environnants par deux ravins : celui de la Mission à l’est, celui du Tchad au sud.

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Les premiers campements du camp Tchad, en 1900

Cet espace fut concédé aux militaires vers 1900, date de construction des premiers cantonnements. Il subsiste encore derrière et autour du Mess quelques cases remontant à 1902.


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Le marché du Plateau

L’avenue Charles De Gaulle qui jusqu’en 1945 se nommait simplement « avenue N°2 », passe par des bâtiments commerciaux de plus d’un siècle qui encadrent la halle du Marché du Plateau édifiée en 1938. Initialement le marché principal, très actif dès 1905, était installé sous une halle primitive près des actuels bureaux présidentiels, un édifice par la suite transformé en maison puis rasé en 1980.

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Ancien marché du Plateau

Le CFRAD (Centre de Formation et de Recherche en Art Dramatique), est ce qui reste, totalement remanié, du Cercle Civil construit de 1904 à 1906. Il fut le cadre en 1944 de la célèbre Conférence de Brazzaville dirigée par De Gaulle, où s’amorça la décolonisation.

 

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L’hopital général, inauguré en 1957

La légende dit que les colons auraient découvert une mine de diamant à l’emplacement après le ravin du quartier Tchad. Mais aigris par la décolonisation inévitable, ils obstruèrent ce trésor en déposant l’Hôpital Général.

 

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Le rond-point des combattants, 1980.

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Le ministère des mines, et énergie, sur le Rd-Point des Combattants.

Le Rond-Point des Combattants, véritable nom du « rond-point du Centre Culturel Français (CCF) », est devenu un des noeuds essentiels de la circulation brazzavilloise depuis son réaménagement à partir du X°anniversaire de Révolution en 1973. Les vieilles cases coloniales jaunâtres à toit de tôles rouillées ont cédé la place à un ensemble résolument contemporain : la Tour du Plan*

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Ministère du Plan, sur le Rd-Point des Combattants

qui abrite le ministère du même nom (depuis 1983), le ministère des Mines et de l’énergie, imposant mais sans originalité, le nouveau Centre Culturel André Malraux… Laissons la parole à R. Frey qui souligne l’aspect encore « vieux colonial » que présentait le Plateau à la veille de l’indépendance.

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Le square de Gaulle, Bacongo.

Le Square De Gaulle est un vaste secteur monumental conçu par Erell et sorti de terre à partir de 1949, centré sur un immense jardin orné depuis 1961 d’un buste de Charles de Gaulle réalisé par Parriot. En 1995-96 Albert Massamba artiste congolais a mis son talent au service de la gloire du colon*. Son travail, d’un rare talent est évocateur d’un art de la céramique encore très vivant au Congo. Sur le socle du buste, des reliefs expriment une vision assez coloniale des liens qui ont uni les destins de De Gaulle et de Brazzaville pendant plus de vingt ans.

 

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La Fac des Sciences à gauche de l’horloge et la fac de Droit à droite, dans le
bâtiment de l’ancien Institut Technique, puis ex-Collège Raphaël Boboutou.

Au fond du square, deux édifices de très vastes proportions, malheureusement délabrés faute d’entretien et enlaidis par des adjonctions « sauvages » qui ont en partie défiguré leurs lignes générales : le lycée Savorgnan de Brazza (1949- 1951), premier établissement secondaire commun aux colons et aux colonisés et surtout l’ancien Institut Technique achevé en 1952, peut-être l’oeuvre la plus importante de Roger Erell après Sainte-Anne du Congo. Ce gigantesque bâtiment s’organise autour d’une série de cours intérieures conçues comme des cloîtres autour desquels s’organisent les circulations, protégées du rayonnement solaire par des brise-soleil originaux. La façade est centrée sur une tour de l’horloge qui rythme l’ensemble.

L’avenue de Brazza passe à gauche devant l’église Notre-Dame du Rosaire, dessinée par Normand et bâtie en 1963. L’architecte s’est inspiré de la tradition kongo pour la façade ornée d’un portail-clocher reprenant la silhouette du ngongui, instrument de musique servant à convoquer les réunions dans les cités kongos.

 

nan de Brazza, au bout de l’avenue de Brazza à Bacongo.

Au bout de l’avenue, après la traversée de la partie la plus ancienne de Bacongo (noter au passage à droite une placette entourée de très vieilles cases et autrefois ornée d’une fontaine aux masques, décorée vers 1955 de masques en céramique dessinés par R. Frey et vandalisée par la suite, cela bien avant les guerres civimes), il y’a la place Savorgnan de Brazza, largement ouverte sur l’immense panorama du Pool avec les deux capitales face-à-face, espace urbain unique au monde : le Congo y roule ses eaux grises, dans la démesure de ses 25 km de largeur avant le resserrement (de 2 km quand même !) entre les métropoles soeurs.

 

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Mémorial et Place Pierre Savorgnan de Brazza, sur le promontoire de Bacongo, au bout de l’avenue du même nom.

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Le mémorial en 1954

Au bout de l’avenue, après la traversée de la partie la plus ancienne de Bacongo (noter au passage à droite une placette entourée de très vieilles cases et autrefois ornée d’une fontaine aux masques, décorée vers 1955 de masques en céramique dessinés par R. Frey et vandalisée par la suite, cela bien avant les guerres civimes), il y’a la place Savorgnan de Brazza, largement ouverte sur l’immense panorama du Pool avec les deux capitales face-à-face, espace urbain unique au monde : le Congo y roule ses eaux grises, dans la démesure de ses 25 km de largeur avant le resserrement (de 2 km quand même !) entre les métropoles soeurs.

Autour de cette place restaurée en 1995, deux témoins du passé glorieux de la cité : le Mémorial Savorgnan de Brazza est un monument commémoratif dédié par la capitale à son fondateur et à ses compagnons, et inauguré, encore inachevé, en 1944. Des bas-reliefs du sculpteur Barroux l’ornaient jadis, détruits dans les années soixante durant la révolution. En face, la Case De Gaulle inspirée du palais de Chaillot a été construite en 1942 par Erell pour le chef de la France Libre. Elle est aujourd’hui la résidence des ambassadeurs de France.

 

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La case De Gaulle.

L’architecte a intégré l’édifice dans les lignes horizontales du plateau de Bacongo, mêlant adroitement béton et grès du Djoué. L’intérieur a conservé une grande partie de son décor et de son mobilier d’origine.

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Saint Pierre-Claver, Bacongo.

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L’architecture moderne sur les grands immeubles brazzavillois est due essentiellement à l’ère Denis Sassou Nguesso. A une exception près, l’ancien immeuble de l’ARC inauguré par Marien Ngouabi. Sans doute la durée au pouvoir du maître de Mpila l’explique. Toutefois, l’historien du futur, débarrassé des à priori de notre temps, nommera par « style Sassou Nguesso », une architecture et une époque (et aussi sûrement un goût personnel du maître des lieux) se caractérisant par des immeubles bureautiques massif et renfermés sur eux-mêmes, souvent austères, sans originalité technique.

 

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Et pour l’originalité…

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…Horus à Brazzaville!

 

 

 

 

 

 

 

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Le palais du peuple

Article lu sur http://www.presidence.cg/palais_presidentiel/historique.php

Palais du peuple

L’actuel palais présidentiel congolais, ou Palais du Peuple, est sans doute l’un des monuments essentiels de Brazzaville, par son ancienneté et sa qualité architecturale.

Le palais s’élève au centre du quartier du Plateau, petite colline étroite où, avant l’arrivée de Pierre Savorgnan de Brazza, se trouvait une modeste agglomération composée par les logements des esclaves du chef traditionnel du bourg pré-colonial de Mfa (ou Mfoa) situé prés de l’actuelle Mairie Centrale. En 1884, Charles De Chavannes, compagnon de Brazza, précisera même qu’il y avait là, sensiblement entre le palais que nous connaissons et le milieu de la place du Gouvernement, 17 cases. Nous savons que le peuplement du site de Nkuna, qui deviendra Brazzaville, était teke; ces cases étaient donc sans doute issues des techniques propres à cette culture: plan quadrangulaire avec élévation demi-cylindrique utilisant bois et raphia. Des cases semblables subsisteront non loin du port de Yoro (Mpila) jusqu’en 1954.

Si le poste de Brazzaville est fondé le 3 Octobre 1880 à l’embouchure de la Mfoa, ce n’est qu’en 1882 que le site de Nkuna prendra le nom de l’explorateur, site qui était déjà densément peuplé par plusieurs milliers de pêcheurs et de commerçants Batéké et Bakongo. Il faudra encore attendre deux ans pour que De Chavannes exproprie le village des esclaves du chef Nguia et construise en Septembre 1884, au centre de l’actuelle place du Gouvernement, la première maison de la future capitale, petite construction de bois et de chaume au toit à quatre pans qui disparaîtra dès 1903.

En 1901 les autorités coloniales françaises décident de doter Brazzaville, agglomération alors distendue et bien vide, d’un palais destiné au gouverneur du Congo Français. A 170 mètres à l’ouest de la première case on élève alors une belle construction de deux niveaux ouverts par des circulations aux multiples arcs surbaissés et dont l’étage est desservi par un escalier extérieur. C’est la partie centrale du palais actuel. Cet édifice était conforme aux canons de l’architecture coloniale alors en vogue dans les régions tropicales, des Antilles à l’Afrique Noire et aux Indes: un corps central enveloppé de vérandas ouvertes permettant une ventilation naturelle. Utilisation de la briquette produite localement, et du bois.

Devenue capitale du Congo Français en 1903, de l’Afrique Equatoriale Française en 1908, et dotée d’une Commune en 1911, Brazzaville s’installait doucement dans la durée, malgré une population très réduite: en 1900 la ville ne comptait que 3 800 Africains, et 248 Européens dont 7 femmes (les Sœurs de Cluny arrivées en 1892!)… Jugeant la résidence du Gouverneur de l’AEF bien petite, l’administration décide de bâtir un nouveau palais dont le projet est confié à l’architecte Paul Boyer; ses études aboutissent à un édifice de type parisien post-haussmannien alors très prisé en France mais… trop coûteux. Heureusement, car le parti adopté par les autorités va produire une vraie réussite esthétique.

Au lieu de remplacer le palais de 1901, on l’agrandit de deux ailes latérales en rez-de-chaussée et on harmonise le décor, sobre et élégant: les arcades des vérandas sont fermées par des volets à persiennes, les piliers qui les séparent sont ornés de faux pilastres, les toitures autrefois débordantes sont mises en retrait derrière une balustrade ajourée décorée aux angles de «pots à feu» sculptés. Des oculi aveugles s’intercalent entre les arcades de l’étage. On ajoute également un élégant porche en avancée à pans coupés surmonté d’une petite terrasse pour d’éventuels discours officiels.

Les travaux sont achevés en 1914, et l’édifice ne connaîtra plus de changements majeurs jusqu’aux dernières années du XX°s. En 1944 le Gouverneur Bayardelle fera agrandir vers l’arrière la partie centrale, heureusement sans toucher aux façades Est; ces travaux, menés par le génial Roger Erell (Basilique Sainte-Anne, Case de Gaulle, Trésor Public, Stade Eboué…) ne sont pas la plus belle réussite de cet architecte. Au sud du palais, le long de la vieille rue Lamothe, sont construits de beaux annexes dans les années vingt et trente. Ils subsistent encore, assez bien conservés.

Après l’indépendance, le Palais du Gouvernement Général de l’AEF devient résidence présidentielle et subit sous Marien Ngouabi une première atteinte à son architecture : les arcades sont obturées et remplacées par des fenêtres… rectangulaires! En 1982, sous Denis Sassou N’Guesso, une excellente restauration gomme ce désastre et rend son lustre au palais, agrandi au sud par une salle moderne dont la façade reprend le décor du vieux bâtiment.

Jardins du palais

En 1994 le président Lissouba fait ajouter au palais un auvent monstrueux qui déséquilibre l’harmonie de la façade; la reprise, pour cet auvent, des motifs décoratifs des parties anciennes n’améliore pas les choses. Il serait souhaitable de supprimer cette adjonction.

Restauré après les bombardements du conflit de 1997, le Palais du Peuple de Brazzaville est un très rare exemple de continuité historique en Afrique: il est le siège officiel du pouvoir politique au Congo depuis plus de cent ans.

Dans ce palais se sont succédé plusieurs personnages historiques majeurs, comme Félix Eboué, qui y logea avec son épouse de 1940 à 1944, ou Ngouabi au début de son parcours à la tête de l’Etat. C’est dans ses murs que le gouverneur vichyste Husson fit sa reddition aux Forces Françaises Libres de Charles De Gaulle en 1940. C’est devant cette façade que la foule des manifestants conduisit Fulbert Youlou à la démission en Août 1963.

Noter au passage que l’allée qui part du portail du palais droit vers l’Est est l’ancienne rue Edouard Renard, la plus ancienne voie de Brazzaville, ouverte sans doute dès 1884 pour relier le poste naissant au Wharf dit «de la Briqueterie», au bord du Congo. Elle fut coupée dès 1934 par le premier Tennis-Club.

H. BRISSET-GUIBERT

Diplômé d’Etudes Approfondies en Histoire. Poitier (France) Lu sur http://www.presidence.cg/palais_presidentiel/historique.php

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2ème Partie: HISTOIRE DE BRAZZAVIILLE, La société brazzavilloises

 

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HISTOIRES REGIONALES

 

1ère Parie: LES ETHNIES

L’anthropologie et l’ethnologie naissent avec la colonisation, se détachant de la sociologie, une jeune discipline elle-même. Ces sciences dont l’objet est, disons-le franchement, l’étude du sauvage dans son milieu naturel, vont dégager des normes pour classifier des groupes et les particulariser les uns des autres. Ainsi naquirent les ethnies, une approche conçue par la pensée européenne et intraductible dans les langues bantoues sur qui vont s’appliquer ces classifications. Peu à peu cette catégorisation s’est renforcée, officialisée, créant des ensembles qui intègrent ou exclus, sur des critères pas toujours objectifs. Ainsi, Monsieur de Brazza qui avait l’obsession de voir des tékés partout, baptisa de ce nom, d’un regard, nombres de peuples et même d’animaux (poules ou chiens batéké), sous prétexte qu’ils présentaient des ressemblances avec un autre. C’est ainsi que, lorsque sa route croisa des pêcheurs mbochis qui rencontraient sans doute un blanc pour la première fois et se mirent à le traiter d’avouri (revenant) en hurlant et lâchant leurs flèches, Brazza qui bâtit en retraite nota dans son carnet de voyage « bafourou, sous groupe téké, peuple hostile« . Assez curieusement, ces mbochis finiront par se dire téké à en jurer, prenant les carnet de Brazza pour témoignage absolu. Il en est de même pour les gangoulou sans doute plus proche du groupe mbochi. Les vili sont un groupe identitaire ou linguistique non identifié par les témoignages durant le moyen age africain et la traite, mais ils constituent aujourd’hui la majorité des populations de la région du Kouilou, le Loango ancien. Les tékés également apparaissent assez brutalement dans l’histoire, remplaçant ceux qu’on avait vaguement appelé anziques et qui n’existent curieusement plus.

La société est un élément vivant, dont les identités se rapprochent, se recomposent et se décomposent. Pour peu qu’elles restent libres. L’ethnologie coloniale a par contre créé des frontières autour de ces groupes et les a figé. La mémoire historique ayant été en grande partie effacée faute d’écriture, les premiers éléments figés par la colonisation ont fini par être considérés comme étant la vérité originelle, le point de départ qui a toujours existé comme tel. Vers 1900, l’administrateur colonial Charles Dechavanne écrira et répandra l’idée que les kongo sont commerçants de culture et donc propices à l’administration. Alors qu’en réalité, ils étaient naturellement agriculteurs comme n’importe quel africain et qu’ils n’exerçaient cette activité commerciales que depuis la fin de la traite négrière et l’établissement de nouveaux rapports avec les portugais, soit depuis les années 1850 (voir l’onglet « kongo »). Voici les kongo dont l’histoire est refaite, se prendre pour des génies des études et du business plus que les autres, dénigrant désormais le travail de la terre et les rituels agricoles qui depuis des millénaires avaient façonné leur culture et patronné à leur réussite. En effet, l’agriculture a permis la sédentarisation des kongos, l’organisation sociale puis politique qui a donné naissance à un puissant pays; elle a mis en place les systèmes lignagers, patronymiques, religieux et, coutumiers que nous connaissons dont la plus fondamentale est le matriarcat, et qui donnent sens et signification à ce groupe. Tout ceci es balayé en un rien, par la pseudoscienc coloniale de la classification par ethnie.

Cette fausse histoire, figée de l’ethnographie a créé des troubles dans la mentalité congolaise postcoloniale. On peut changer de nom, de nationalité, de langue, mais l’ethnie devient cristallisé comme une tare congénitale indissoluble, alors que la nature des identités humaines est de s’adapter sans cesse. L’ethnie réduit également la perception historique de chacun et du collectif puisque son invention coloniale a créé une sorte de registre des ethnies historiques du Congo ou il faut figurer pour avoir droit de citer : avoir été annoté par le colonisateur français à son arrivée. Ce qui pose le problème de l’intégration des nouvelles populations venues d’ailleurs, après ou pendant la colonisation, car tout peuple a besoin d’immigration intégrée. L’apparition des lari dans les années 1920 avec l’urbanisation de la ville-capitale a laissé pantois le reste des congolais. La plupart contestent encore l’existence d’un tel groupe, sous prétexte que l’inventeur conceptuel du Congo, le colon, ne l’avait pas noté. Il s’est agit sans doute d’une évolution, d’un brassage, d’une mutation d’autres groupes qui a donné naissance à cette identité. Et c’est là la genèse de toutes les autres identités libres, qui aurait fait place à l’identité congolaise, n’eut été cette fixation coloniale et pseudo-scientifique entretenue par des ethnologues, anthropologues et autres apprentis sorciers de l’histoire mythologique. D’autres encore auraient pu naitre et se décomposer s’il n’y avait cette incrustation dans le marbre. Nous sommes peut-être entrain d’assister à une nouvelle ethnogénèse due aux évènements des années 90, l’ethnie nibolek, qui s’est créée une culture commune (le chemin de fer, la ruralité), un mythe commun (l’exclusion au pouvoir et le rôle de porteurs d’eau pour d’autres grands groupes du pays: d’où l’émancipation nécessaire), une langue commune (le kituba), un héros unificateur …etc. L ‘ethnie n’est donc rien de plus qu’un rapprochement géographique hasardeux et ponctuelle, ou une réaction consciente à moment donné, pour se créer un réseau de solidarité.

Les populations congolaises peuvent être objectivement distinguées en un seul groupe culturel aux attaches et aux racines profondes, c’est le groupe Bantou. Une petite minorité fait partie du groupe dit « pygmées », dont l’assimilation aux bantous est en réalité très profonde. Au dela de l’identité bantoue, multimillénaire, le reste des caractères qui distinguent les congolais apparaissent comme passagers, conjoncturels, superficiels et superflus. C’est le fruit d’un parpillement des bantous qui a duré quelques siècles, évolué plus moins séparément, sans vraiment se perdre de vue puisque les différentes migrations n’ont cessé de compléter des groupes partis plus avant, ou rejoindre ceux qui étaient demeurés au même endroit. Aujourd’hui les justifications même de l’unité congolaise sont dans ce qui parait diviser: car les coutumes, les langues, les mythes de ces peuples sont beaucoup plus identiques qu’on ne le croit. Pour peu que l’on maitrise les clés différentielles, un congolais est capable de comprendre toutes les 42 langues du Congo. Ce site ouvrira un sujet sur la linguistique ou chacun pourra apprendre les clés et constater que tous les congolais ne parlent au fond qu’une seule et même langue, le bantou. Quant à la coutume, tous les africains sont de souches matriarcales et leurs coutumes profondes en découle depuis la préhistoire. Le patriarcat de certains sous-groupes n’est au fond qu’une façade, créée souvent parce qu’une organisation militaire s’imposait, notamment à cause des troubles dus à l’esclavagisme. Le professeur Cheikh Anta Diop dans son puissant ouvrage « L’unité culturelle de l’Afrique noire » (que nous vous recommandons vivement), démontre ce fait. L’origine nomade de la civilisation indo-européenne leur a donné un patriarcat institutionnel. Tandis que les africains ayant tôt inventé l’agriculture (8000 ans avant notre ère) se sont sédentarisés. De ce fait, les femmes qui naturellement fondent les sociétés ont moins eu besoin d’hommes pour leur venir en aide. C’est ainsi que même nos chez nos prétendus patriarcaux ce sont les hommes qui apportent la dot alors dans la culture patriarcale pure (Europe, Inde) ce sont les femmes qui l’apportent parce qu’elles sont considérées comme des charges. Remarquez comment tout le monde connait Marie Bouanga, Mama Mboualé, Mama Bondo ou encore MoeBara, mères déifiées des chefs d’Etats congolais prétendus de souches ethniques patriarcaux, alors qu’on ignore presque tout de leurs pères.

La liste des ethnies et les pourcentages dans la population congolaise sont en réalité un témoignage de la sociologie congolaise à la fin du XIXème, qui n’a plus aucune réalité aujourd’hui et dont les résurgences ne sont soutenues que de manière artificielle et illogique. D’où l’inexactitude de toute les approches ethnologiques qui se croient intemporelles. Si on questionnait profondément les congolais eux-mêmes de ce qu’ils pensent de leur appartenance ethnique aujourd’hui, beaucoup concluraient être Mbochi de Brazza, Mbochi des Plateaux et Mbochi de la Cuvette, ou encore lari de Pointe-Noire, de Brazzaville-sud, de Brazzaville-nord, de Mpangala ou du chemin de fer et on pourra constater avec les meilleurs outils sociologiques qu’effectivement, chacune de ses identités nouvelles présentent de réelles différences dans la manière de vivre leurs cultures bantoues et sous-coutumes locales. Le beembé de Makélékélé n’a rien à voir avec celui de Mfilou, de Mouyonzi, de Bouansa ou de Pointe-Noire. Pas même la langue! Le point commun qui leur reste, c’est la congolité, et sans doute un attachement régional pour entretenir un réseau de solidarité nécessaire devant la faiblesse de nos Etats. Sur la région, rappelons que lorsqu’à la fin des années 1950 le Pool et la Bouenza ne formaient qu’une seule région, leur solidarité était de fer: Youlou s’y est appuyé pour se faire élire; la guerre de 1959 est déclenchée par l’assassinat d’une femme Babembé qui sera vengée par des laris, majoritaires parmi ceux du Pool à Brazzaville. Pourtant, lorsque le même une fois au pouvoir crée la région de la Bouenza, il redéfinit un nouveau cercle d’affinité jusqu’à aboutir à une guerre civile Pool/Bouenza, croyant s’être toujours tournés le dos.

Au regard de la longue histoire du Congo et de ses populations, il apparait que l’ethnie est une identité de transition, née assez récemment (un siècle à un siècle et demi). C’est une mutation permanente pour l’intégration, un simple lien de sociabilité. Elles sont appelées à se mouvoir au gré des situations comme n’importe quelle autre identité. Les kongo du Moyen age bien que regroupant plusieurs peuples aux identités et aux dialectes divers avaient conscience de former une nation transcendant les différences territoriales. La préhistoire du Congo montre que les prémices de ce peuple remontent à très loin. L’antiquité confirme la naissance du peuple protobantou dans la région des Grands lacs et dans la vallée du Nil. On les retrouve reconquérir le monde ici et là et des traces des congolais actuels sont retrouvées dans la linguistique de divers peuples loin dans l’Antiquité. Les ethnies dont certaines n’ont pour seule différence que des techniques alimentaires ou un accent, n’ont de réalité solide qu’ à cause de l’ignorance historique du peuple Congolais. Heureusement que rien n’est irréversible. Quoi qu’il ne soit pas illégimite d’avoir des liens d’affinités avec un réseau de solidarité régionale. Ceux-ci permettront de pouvoir développer les régions assez facilement en faisant appel à cette énergie, cet amour d’un terroir donné et cette confiance qui existe déjà entre les ressortissants d’une même entité. Ce qui pour l’heure est beaucoup plus difficile à obtenir au niveau national, car trop de méfiance, trop de guerres, trop de peurs se sont installées depuis la Traite négrière jusqu’à nos jours.

 

2ème partie: HISTOIRES LOCALES

-Le Grand-nord

- Le Centre

- Le Sud-est

- La Centre-sud

- Le Sud-Ouest

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C. HISTOIRE POLITIQUE

1ère Partie: De 1945 à l’indépendance

En 1942, année de la disparition d’André Grenard MATSOUA (voir onglet « Biographie« ) entre en aplication une circulaire du gouverneur Félix Eboué proclamant d’associer étroitement les autochtones à la vie politique. Cela implique la remise en fonction des structures politiques traditionnelles, mises en veilleuse depuis le début de la colonisation. D’autres chefferies seront créées de toutes pièces, aux côtés de ce qu’on appellera les communes indigènes à la tête desquels on place des instituteurs et cadres moyens formés rapidement pour exercer des fonctions administratives. Appelés « notables évolués » ils sont les premiers noirs depuis l’indépendance à administrer parcelles du pays. Bien que leur pouvoir n’est limité qu’aux affaires indigènes. L’ouverture des GEC, Groupe d’Etudes Communistes vers la fin de la guerre permet à cette classe dominante naissante d’acquérir les rudiments du combat politique et des questions idéologiques qui traversent la résistance française. Ils sont encourager par le pouvoir colonial car ils servent de relais auprès des paysans afin de canaliser l’action politique et éviter des débordements incontrôlables, comme celles que connaitra Douala à la même époque.

Du 28 janvier au 8 février 1944 se réunissent à Brazzaville les gouverneurs de l’Afrique équatoriale Française. Cette « Conférence de Brazzaville » lance les bases de ce qui pourrait être la préparation des pays colonisées à plus de responsabilités. En fait, le pouvoir colonial a besoin du soutien des colonies pour l’ultime effort de la guerre dont tout le monde attend le débarquement des alliés, et en échang, propose un meilleur statut aux indigènes. Les cadres territoriaux sont donc particulièrement chouchoutés afin de servir de relais et de rabatteur pour les possibles appelés au front. Deux ordonnances du Gouvernement Provisoire de la République Française, des 21 août et 13 septembre 1945, vont reconnaître les droits politiques fondamentaux des indigènes dans les Territoires d’Outre-mer. Le droit de vote est limité aux « assimilés » (les instruits formés à l’école du maître), mais droit est reconnu aux indigènes de se constituer en associations politiques. Deux grands partis politiques vont voir le jour à la fin de 1946 : le PPC (Parti Progressiste Congolais), du sudiste Félix Tchicaya, affilié au Parti Communiste Français (PCF), et la Section locale de l’Internationale Ouvrière (qui deviendra en 1957 le Mouvement Socialiste Africain, MSA), de Jacques Opangault, grefiier au Palais de justice de Brazzaville, affiliée à la Section Française de l’Internationale Ouvrière (SFIO).
Les premières élections libre ayant pour but d’élire un représentant du Moyen Congo (Congo et Gabon actuel)  aboutiront le 18 novembre 1945 à l’élection de Jean-Félix Tchicaya comme député le collège des « non-citoyens », à savoir les indigènes, avec 1 334 voix. Sa double ascendance sur le Congo et le Gabon lui a sans doute fourni un profil de choix pour l’emporter.  Il sera facilement réélu avec 3 356 voix en juin 1946. La loi a institué deux collèges électoraux dans les Territoires d’Outre-mer : un collège de métropolitains et un autre d’indigènes. A Bamako le octobre 1946 se crée entre les nouveaux députés africains à l’assemblée de Paris, le Rassemblement Démocratique Africain, premier parti panafricain, sous la houlette de Félix Houphouët-Boigny. Tchicaya en est le 1er vice-président. Tchicaya devra ses nombreuses réélections à l’appui considérable dont il bénéficie de la part des populations à Kongos à qui il fait croire durant ses campagnes (selon Alexis Gabou) qu’il est en relation directe avec Matsoua à Paris. Les Kongos attachés à leur leader et qui pour la plupart le croient vivant, soutiendront sans réserve cet allié providentiel.

Le 23 juin 1956, le parlement français adopte la loi dite Defferre (du nom de Gaston Defferre, ministre chargé des territoires d’Outre-mer). Cette loi ajoute aux anciennes dispositions constitutionnelles relatives aux Territoires d’Outre-mer la généralisation du suffrage universel. Les Congolais deviennent (en droit) des citoyens à part entière. Le principe de l’indépendance étant désormais acquis, les électeurs sont appelés aux urnes en mars 1957 pour désigner l’Assemblée Territoriale, dont les missions majeures sont de désigner le chef du premier gouvernement congolais et de rédiger la première constitution congolaise. La donne politique a changé entre-temps. Le 2 janvier 1956, le renouvellement de la représentation nationale française propulse sur la scène politique territoriale un nouveau mouvement politique, l’UDDIA (Union pour la Démocratie et le Développement Intégral Africain) et un nouveau leader, l’abbé Fulbert Youlou. Pour remporter les élections à l’Assemblée Territoriale et contrer la montée de l’UDDIA, le PPC s’allie au MSA. La coalition remporte les élections à une très courte majorité (23 sièges contre 22) et forme le premier gouvernement congolais.

La politique est en effet devenue affaire de politiciens. En septembre 1957, l’UDDIA débauche un député du MSA et devient majoritaire à l’Assemblée Territoriale. La coalition MSA-PPC, indignée par la manœuvre, refuse de quitter l’exécutif. Le 28 novembre 1958, à la séance solennelle et historique qui doit donner au pays de nouvelles institutions, l’Assemblée Territoriale vote par 44 voix et 1 abstention la proclamation de la République. Mais sur la question de la prise en compte du renversement des rapports de force à l’Assemblée, le désaccord est total. Les débats commencés le matin s’achèveront sans compromis l’après-midi avec le départ collectif des députés du MSA. En leur absence, l’Assemblée élit le chef de l’UDDIA, l’abbé Fulbert Youlou, chef du gouvernement. La haine qui, des appareils politiques, a gagné l’électorat populaire ne demande plus qu’à exploser en guerre civile. Dès le lendemain de l’élection du chef du gouvernement éclatent à Dolisie, la troisième ville du pays, des troubles de militants qui vont par effet de contagion gagner Pointe-Noire, la capitale économique, puis un peu plus tard, en février 1959, Brazzaville, capitale poli-tique, où pendant quatre jours les deux camps vont rivaliser de barbarie. Les forces de l’ordre finissent par ramener le calme, et la barbarie contraint les leaders politiques à revenir vers la raison nationale.

 

2ème Partie: LE REGIME YOULOU

Quand il signe, le 14 juillet 1960, à Matignon, les accords de transfert des compétences, l’abbé Fulbert Youlou pense que le oment est si solennel qu’il doit s’entourer de toutes les forces politiques. Il se présente alors avec les leaders de l’opposition, Jacques Opangault et Stéphane Tchitchélé (qui a remplacé à la tête du PPC Félix Tchicaya, démissionnaire). L’indépendance est proclamée  le 15 Août 1960 dans l’allégresse organisée car en réalité, le peuple est inquiet tandis que les cadres se disputent déjà le pouvoirs et les biens abandonnés par les colons.

Après l’élection présidentielle du 26 mars 1961 où il est seul candidat, l’abbé Fulbert Youlou forme avec l’opposition un gouvernement d’union nationale et le poste de vice-président, créé opportunément par la révision constitutionnelle diligentée trois semaines plus tôt, est confié à Jacques Opangault. Désormais dans le discours, l’unité nationale doit l’emporter sur les considérations ethniques, le peuple congolais est un et indivisible ; l’hymne national le rappelle : « Le Congo nouveau est notre nation, oublions tout ce qui nous divise, et soyons tous unis à jamais ». L’unité nationale devient l’enjeu politique majeur. Autour d’elle s’organise désormais la lutte politique. Pour l’opposition, réduite au MSA après la démobilisation du PPC suite à la retraite pour cause de maladie de Tchicaya, il s’agit de rester associée à l’exercice du pouvoir, et pour la majorité de consolider le pouvoir en empêchant l’opposition de s’exprimer ailleurs que dans le gouvernement d’union nationale.

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Opangault, Youlou et Tchitchélé, devant le premier gouvernement congolais. 

La disparition prématurée de Jacques Opangault, suivant celle de Tchicaya, fait craindre à Youlou une concentration du pouvoir autour de son parti.  D’autant que les principaux cadres de ce parti, bien que du Pool comme lui, n’hésite plus à le contester et à le critiquer. Il fait voter le 13 avril 1963, la loi 14-63, instituant le régime de parti unique afin d’intégrer toutes les composantes politiques au débat politique national. Mais son pouvoir est trop affaibli. Le coup de grâce viendra quatre mois plus tard, avec la décision du Président d’instituer un syndicat unique. Soutenu par une forte mobilisation populaire et par l’armée, le cartel des syndicats libres obtient le 15 août, fête anniversaire de l’indépendance, la démission du président de la République.

 

3ème Partie:  LES REGIMES MARXISTES

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Massamba Débat sur la place de la gare

Le nouveau pouvoir, cartel de marxisants et de militaires, institue autoritairement le même monolithisme politique et syndical que celui qu’il a combattu. Désormais il n’y aura plus qu’un parti, le MNR, Mouvement National de la Révolution, et un syndicat, la CSC, Confédération Syndicale Congolaise. Au nom de l’unité nationale. Et les critiques a posteriori du régime de Youlou mettent en avant la dérive autocratique et la partialité ethnique.

A suivre et à compléter…

 

 

 

 

2ème partie: Le régime Youlou

3ème partie: Le parti unique, le marxisme.

4ème partie: La Conférence nationale.

5ème partie: Le retour du PCT

 

Aidez à compléter

 

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